La législation européenne applicable aux services médias de l'audiovisuel doit être « revue » afin qu'il « puisse y avoir les mêmes règles » pour tous, a estimé jeudi le président François Hollande faisant allusion à l'arrivée de nouveaux acteurs comme Netflix.

« La France adressera très prochainement ses propositions à la nouvelle Commission pour qu'il puisse y avoir les mêmes règles qui puissent s'imposer », a déclaré le chef de l'Etat lors d'un séminaire au CSA (Conseil Supérieur de l'Audiovisuel). « Les entreprises du numérique installées ailleurs qu'en Europe doivent être soumises au même régime d'imposition que les opérateurs historiques dès lors qu'elles diffusent sur les mêmes lieux », a-t-il expliqué, deux semaines après l'arrivée dans l'Hexagone de Netflix, géant de la vidéo à la demande qui a installé son siège européen au Luxembourg.

Dénonçant « l'inéquité fiscale » et ceux qui « s'établissent loin mais diffusent ici sans avoir les mêmes obligations » mais sans jamais nommer Netflix, M. Hollande a indiqué que « la France proposera que la notion d'établissement virtuel puisse être préférée à celle d'établissement stable » afin d'éviter « des possibilités d'évasion ». « Il faut que les opérateurs qui agissent sur le même marché puissent évoluer dans un cadre commun et cohérent », a-t-il conclu.

François Hollande a salué une avancée au niveau national, un « premier pas insuffisant »: « en matière de TVA, la règle de destination se substituera l'année prochaine au pays d'établissement ». Avec un siège européen au Luxembourg, puis aux Pays-Bas en 2015, Netflix échappe à l'impôt français sur les sociétés, une exception parmi d'autres qui rend furieux ses concurrents français.

Harmonisation européenne

Jeudi matin, la ministre de la Culture Fleur Pellerin avait déclaré que les règles de concurrence devaient être « les mêmes pour tous » jugeant qu'il fallait revenir sur « le principe actuel du pays d'origine » et « faire en sorte que les services audiovisuels souscrivent demain aux obligations légales des pays auxquels ils se destinent ». Jusqu'à présent, la ministre avait estimé qu'il ne fallait pas « vilipender les multinationales » qui cherchent une fiscalité avantageuse et avait espéré des offres concurrentes françaises. « C'est une situation qui ne doit pas se régler en vilipendant les sociétés qui font ce choix, puisque c'est un choix de rationalité économique », mais en « faisant en sorte qu'on harmonise les conditions fiscales au niveau européen », avait-elle ainsi dit début septembre.

Évoquant « les nouveaux acteurs, ayant vocation à développer des services à l'échelle mondiale, permis par le numérique » et qui « modifient l'écosystème de la création et la production », Fleur Pellerin a expliqué jeudi qu'ils n'étaient pas soumis au cadre juridique et légal français « en raison des règles de territorialité en vigueur, à défaut d'établissement en France ». « L'avantage concurrentiel qu'ils en retirent doit par conséquent être neutralisé », a-t-elle poursuivi.

Reconnaissant que ce point ne faisait « pas tout à fait consensus à ce stade », Mme Pellerin a indiqué qu'il ne s'agissait pas de « fiscalité punitive ni d'une croisade anti-internet ou protectionniste », mais qu'il fallait « recréer des conditions d'égalité de traitement, d'équité ». « C'est un combat que j'entends mener avec force », a assuré la ministre, appelant de ses vœux la « mise en place d'un système européen audiovisuel fort capable de lutter à armes égales avec les géants du net ». « Le travail du G20 sur l'érosion des bases fiscales et le transfert des profits, dans lequel la France a joué un rôle d'impulsion majeur, s'inscrit dans le cadre de cette ambition pour créer des conditions de concurrence plus équitables », a-t-elle ajouté.