« Qui n’a pas encore son assurance-vie ? » C’est le message que semblent lancer actuellement toutes les banques de détail françaises aux épargnants, dans un remarquable unisson. Pourquoi cet empressement ? Et qui, banque ou épargnant, a le plus à y gagner ?

Faites l’expérience vous-même : rendez-vous dans votre agence bancaire avec quelques économies à placer. Si vous n’en possédez pas déjà une, il y a 9 chances sur 10 que votre conseiller vous propose une assurance-vie. La domination de l’assurance-vie sur le paysage de l’épargne française n’est pas nouvelle. Les chiffres parlent d’eux-mêmes : son encours a dépassé les 1.600 milliards d’euros en mai dernier, tandis que celui cumulé du Livret A et du LDD , deux produits certes plafonnés, s’approche seulement des 360 milliards. Toutefois, l’engouement autour du « couteau suisse de l’épargne » prend actuellement un caractère encore plus pressant.

Pour s’en convaincre, il suffit d’observer les efforts déployés par les banques en ligne pour vous convaincre de souscrire une assurance-vie. ING Direct a lancé en février dernier son « Coach Epargne », une application destinée à orienter ses clients vers les meilleurs choix de placement. Au final, l’opération se résume souvent à vous proposer une assurance-vie. La banque en ligne fait également la promotion de la prime de 120 euros offertes à ceux de ses clients qui souscrivent. Chez Fortuneo, qui a fait de l’assurance-vie son produit phare, ce placement est aussi un instrument de conquête : les nouveaux clients bénéficient ainsi actuellement d’une prime de 150 euros pour une première adhésion.

Une réponse à la conjoncture

Pourquoi cet empressement des banques, et particulièrement des enseignes 100% à distance ? Il s’agit évidemment d’une réponse à la conjoncture de taux, totalement inédite. Historiquement, le secteur a gagné de l’argent en plaçant les dépôts effectués par les clients sur leurs comptes courant ou d’épargne. C’est particulièrement vrai des banques en ligne, qui ont longtemps été des spécialistes des livrets à taux boosté, avant de diversifier progressivement leurs offres.

Problème : pour tenter de redémarrer le moteur de la croissance en Europe, la Banque centrale européenne (BCE) a mis en place une politique monétaire particulièrement défavorable aux placements bancaires. L’institution pénalise notamment les dépôts au jour le jour des banques en leur appliquant un taux négatif. Dans ce contexte, impossible ou presque, pour les banques, de gagner de l’argent avec les dépôts bancaires de leurs clients. « Quand un de vos piliers de rentabilité s’effondre, les autres deviennent relativement plus importants », résume Benoît Grisoni, le patron de la banque de détail chez Boursorama. « Dans le contexte actuel, le modèle économique de l’assurance-vie est nettement plus favorable pour les banques que celui des livrets d’épargne ».

Rétrocommissions

Qu'est-ce rend l'assurance-vie si intéressante pour les banques ? Les frais, évidemment ! Les banques traditionnelles, qui disposent toutes d'une filiale spécialisée en assurance-vie, perçoivent à la fois des frais d'entrée sur les versements, des frais d'arbitrage et des frais de gestion annuels.

En tant que distributeurs, les banques en ligne, qui travaillent avec des assureurs (Generali, Suravenir, Spirica, etc.), sont également rémunérées. Pas par des frais d'entrée ou d'arbitrages, puisqu'elles n'en facturent généralement pas, mais par des rétrocommissions versées par les assureurs sur les frais de gestion des fonds euros et des unités de comptes.

Lire sur le sujet : Comment votre banquier gagne-t-il de l'argent avec votre assurance-vie ?

Un choix gagnant-gagnant ?

Par les temps qui courent, l’assurance-vie est donc la meilleure façon, pour les banques, de rentabiliser l’argent placé par leurs clients. Mais qu’en est-il pour ces derniers ? Benoît Grisoni en est sûr : il s’agit d’un choix gagnant-gagnant. « Certes, les assureurs souffrent aussi des taux bas, et les rendement des fonds en euros sont appelés à diminuer d’année en année », concède le directeur général adjoint de Boursorama. « Mais le produit, par sa nature même, permet de lisser la baisse ».

Nombre d’assureurs, par ailleurs, ont anticipé la situation actuelle des fonds euros traditionnels, très affectés par la baisse de rendement de la dette d’Etat, en créant des fonds dynamiques ou immobiliers. « Il n’y a pas photo », estime Benoît Grisoni, « l’écart de rémunération avec les autres produits d’épargne va rester longtemps à l’avantage de l’assurance-vie, qui dispose en plus d’une fiscalité favorable ».

A consulter : Les offres de contrats d'assurance-vie multi-supports