Longtemps évincé de l’ordre des héritiers légaux, il ne restait plus à la femme ou au mari resté seul, au décès de son conjoint, que les yeux pour pleurer. Même si depuis 2001, la donne a changé en reconnaissant au conjoint survivant des droits à l’héritage, il n’est pas inutile de prévoir des moyens d’améliorer son sort.

On revient de loin. « Traditionnellement, et jusqu'à l'adoption de la loi du 3 décembre 2001, le conjoint survivant était présenté comme le parent pauvre du droit des successions, qui lui était défavorable. Cet opprobre remontait au code Napoléon qui ne permettait au conjoint d'hériter qu'en l'absence d'héritiers jusqu'au douzième degré », rappelle un rapport sénatorial de 2011 (1).

Désormais, après le décès de son conjoint, celui qui survit à l’autre ne court plus le risque d’être chassé du logement commun par des héritiers vindicatifs. Les conjoints sont désormais héritiers l’un de l’autre. De plus, ils héritent en franchise de droits de succession. Mais, lorsque les héritiers réservataires, c'est-à-dire les enfants, réclament la part qui leur est due, le conjoint survivant risque d’avoir à faire à une baisse de son niveau de vie. Voici les moyens d'atténuer la situation.

La pension de réversion

Parmi les mesures de protection, la réversion figure en bonne place. Destinée uniquement aux couples mariés, la pension de réversion consiste à attribuer au conjoint survivant une partie de la pension de retraite (environ 50%) que le conjoint percevait ou aurait perçu s’il n’était pas décédé. Pour le régime général qu'il s'agisse de l'assurance vieillesse pour les salariés, de la mutualité sociale agricole (MSA), de retraite du régime social des indépendants (RSI) ou encore du régime de retraite de base des professions libérales, la pension de réversion est versée au conjoint survivant sous condition de ressources. Si la pension de réversion de retraite complémentaire est accordée sans condition de ressources, elle est supprimée définitivement en cas de remariage.

Aménager le régime matrimonial

Les couples qui se sont mariés sans signer un contrat de mariage devant notaire sont automatiquement soumis au régime matrimonial de la communauté légale, à savoir le régime de la communauté réduite aux acquêts. « Les biens mobiliers ou immobiliers possédés avant le mariage restent leur propriété personnelle », explique le site service-public.fr. Au décès de l’un des conjoints, le survivant conserve de plein droit la moitié des biens de la communauté (appartement, maison, solde des comptes en banque, meubles...). Au titre de ses droits d’héritiers, le conjoint survivant reçoit en plus une partie du patrimoine du conjoint décédé fixée en fonction du nombre d’enfants de ce dernier qu’ils soient communs ou nés d’autres unions.

Plutôt que de changer de régime matrimonial, une procédure lourde et coûteuse, il est possible d’aménager le régime de la communauté légale en demandant à un notaire de rédiger un contrat de mariage de communauté légale et d’y insérer une ou plusieurs clauses permettant au conjoint de prélever par priorité un ou plusieurs biens. Par exemple, une clause de préciput insérée dans le contrat permet au conjoint de prélever par priorité et en pleine propriété le logement familial. La clause de préciput peut être étendue à d’autres actifs comme par exemple un portefeuille d’actions ou des liquidités figurant sur un compte en banque.

Le droit au logement

Dans tous les cas, le conjoint survivant conservera toujours le logement qui est la résidence principale du couple au moment du décès. Peu importe si sa part d’héritage est d’une valeur inférieure à celle du logement. Toutefois, il s’agit seulement d’un droit d’habitation à vie : il n’en devient pas propriétaire sauf à indemniser les autres héritiers à hauteur de leur part dans la valeur du logement.

L’assurance vie pour transmettre un capital

L’assurance vie n’est pas seulement un placement : elle permet de transmettre un capital au conjoint survivant. Le principe : le conjoint qui souscrit le contrat verse des primes à un assureur et à son décès, ce dernier verse un capital au conjoint survivant désigné comme bénéficiaire. L’assurance vie est le moyen d’assurer l’avenir du conjoint sans pour autant diminuer les droits des autres héritiers.

Lire aussi : La fiscalité de l'assurance vie en cas de décès

Ouvrir un compte commun à la banque

Ouvrir un compte commun ou compte joint auprès d’une banque permet au conjoint survivant d’accéder aux fonds qui s’y trouvent. Cela ne signifie pas pour autant que le solde du compte lui appartiendra en totalité, mais cela lui permettra de faire face aux premières dépenses. En effet, le décès ne doit pas bloquer le fonctionnement du compte commun, sauf demande expresse d’un héritier.

Voir aussi : faut-il ouvrir un compte joint et à quel prix ?

Rédiger un testament

Discrétion et souplesse caractérisent le testament : s’il change d’avis, le testateur peut rédiger un nouveau testament qui rend caduc le précédent, ou ajouter un codicille pour en modifier le contenu. Il n’est pas tenu d’en informer les bénéficiaires, ni les personnes exclues. Autre avantage du testament : les biens ne sont transférés qu’au décès du testateur et son patrimoine n’est pas amputé de son vivant.

Rédiger un testament en faveur de votre conjoint vous permet de lui léguer une part de votre patrimoine plus élevée que celle prévue par la loi au titre de ses droits successoraux. Mais votre liberté est limitée : la part que vous léguez au conjoint, ajoutée à celle qu’il reçoit en qualité d’héritier, ne doivent pas aboutir à diminuer les droits des enfants. Le testament peut aussi être utilisé pour léguer au conjoint un bien précis, par exemple votre résidence principale, une entreprise, une exploitation agricole...

(1) La loi sur les droits du conjoint survivant : une loi équilibrée, à l'efficacité reconnue. Rapport d'information n° 476 (2010-2011) de MM. Dominique de LEGGE et Jacques MÉZARD, fait au nom de la commission des lois, déposé le 27 avril 2011