Les taux de crédit immobilier continuent d'augmenter et ne devraient pas s'arrêter tout de suite. Pour plusieurs acteurs du marché, ce phénomène pourrait participer à une baisse des prix de l'immobilier. Suffisamment pour faire baisser les prix et la tension du marché ? Pas si sûr.

Si vous êtes à la recherche d'une maison ou d'un appartement à acheter, la tendance ne vous a pas échappé : les prix de l'immobilier sont toujours à la hausse sur l'ensemble du territoire, excepté Paris. Au premier trimestre, les prix au mètre carré ont progressé de 3,7% sur un an selon Laforêt, de 6% selon Orpi et de 8,2% selon la Fédération nationale de l'immobilier (Fnaim). De son côté, le Baromètre LPI-SeLoger sorti début avril note que les prix continuent à augmenter dans 93% des grandes villes.

Une augmentation que Pascale Sciacalugua, directrice adjointe du réseau du Crédit Coopératif, explique ainsi : « Il faut tout de même noter que nous avons connu une année record de production de crédits immobiliers en 2021, avec des taux anormalement bas, qui ont favorisé la montée des prix des biens. »

Les biens se vendent plus lentement

Pourtant, plusieurs acteurs du marché penchent pour une baisse des prix dans les mois voire les semaines à venir. En cause : la hausse des taux de crédit immobilier depuis le mois de janvier (de 1% à 1,45% entre janvier et avril pour un prêt sur un an selon le courtier Empruntis). C'est le cas par exemple de Sylvain Lefèvre, directeur de la Centrale de Financement : « Les taux sont haussiers. Ce qui veut dire que les emprunteurs vont pouvoir emprunter moins et donc négocier le bien qu'ils convoitent. En face, le vendeur va peut-être d'abord essayer de le vendre à son prix, mais s'il est confronté à la négociation, il va peut-être finir par accepter. »

Les chiffres du baromètre LPI-SeLoger semblent lui donner raison. « L'effet conjugué du retour de l'inflation, de la prochaine élection présidentielle et des interrogations d'une partie des Français quant à la préservation de leur pouvoir d'achat mène à un affaissement de l'activité du marché immobilier dans l'hexagone », note le baromètre, qui poursuit : « En février, les ventes baissent de 9% pour s'établir à près de 22% sous leur moyenne de longue période. Au final, le nombre des logements anciens acquis par des particuliers au cours des 3 derniers mois est en recul de 13,4%, en glissement annuel. » Preuve de ce ralentissement, la Centrale de Financement note une augmentation de 10 à 15% des prêts relais. « C'est un signe que les biens se vendent plus lentement », assure Sylvain Lefèvre.

Autre argument qui laisserait présager une baisse des prix, le retour des négociations, de l'ordre de 5 à 7% du prix du bien en fonction des villes, toujours selon LPI-SeLoger. « Les vendeurs commencent à se rendre compte qu'ils ne vendent plus dans la demi-heure et aussi facilement qu'avant. Même si on ne passe pas du jour au lendemain d'un marché de vendeurs à un marché d'acheteurs, il y a une légère détente », jure Sylvain Lefèvre.

« Les vendeurs commencent à se rendre compte qu'ils ne vendent plus dans la demi-heure »

Il estime également que le coût de l'énergie va jouer sur certains biens. « Depuis deux ans, c'était l'eldorado vers les maisons loin des grandes villes. Mais la hausse des prix, notamment des carburants, peut éloigner les emprunteurs de ces habitations. » En revanche, pour les zones déjà tendues aujourd'hui, Sylvain Lefèvre concède qu'à défaut de baisser, les prix vont sans doute ralentir.

Reste que cette bascule hausse des taux/baisse des prix ne convainc pas tout le monde, à commencer par Maël Bernier, porte-parole du courtier Meilleurtaux : « Je suis prudente, car la hausse des taux aujourd'hui reste bien en dessous de 2% et ne devrait pas modifier trop fortement le marché. Une hausse de 1% à 1,45% pour un prêt de 200 000 euros sur 20 ans, ça représente 40 euros de plus par mois. Donc ça ne va pas changer en profondeur le marché immobilier. »

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Pour elle, la baisse des prix ne se fera que sur les biens les moins demandés, tandis que les biens intéressants continueront à être vendus. Et le ralentissement du marché montre au contraire que « les vendeurs n'ont pas intérêt à vendre. Ceux qui ont un projet ne mettent pas leur bien en vente tant qu'ils n'ont pas trouvé leur prochain bien. Il n'y a pas d'effet boule de neige, les biens vont moins circuler. »

Pour un prêt de 200 000 euros sur 20 ans

Avec un taux à 1%, l'emprunteur devra rembourser 920 euros par mois, soit un coût du crédit de 20 749 euros, hors assurance.

Avec un taux à 1,45%, l'emprunteur devra rembourser 960 euros par mois, pour un coût de crédit de 30 520 euros. Soit 9 771 euros d'écart.

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