Les taux d’intérêt des crédits immobiliers sont toujours au plancher, ou presque, en ce début mars. Mais tout le monde n'en profite pas.

A première vue, la météo des taux immobiliers est au beau fixe pour les emprunteurs à l’approche du printemps. A 1,13% en moyenne, les taux des crédits se sont établis en février au même niveau que les deux précédents mois, selon l’analyse de l'observatoire Crédit Logement-CSA publié mardi. C’est à un cheveu du record historique enregistré en novembre : 1,12%. Ces taux extrêmement bas s’expliquent toujours par la politique monétaire historiquement favorable au crédit que mène la Banque centrale européenne.

En ce début mars, le ciel semble toujours aussi dégagé. « Après un mois de relative stabilisation des taux en février, les établissements de crédit ont de nouveau, pour une majeure partie, opté pour le statu quo en mars, au vu des premières grilles communiquées par les banques partenaires », explique le courtier Emprunt-Direct.com. « Les températures restent douces ainsi que les taux de crédit immobilier. On constate une stagnation des taux sur l'ensemble des durées sauf sur 30 ans. Les taux immobiliers sont toujours favorables à tous ceux qui souhaitent acheter ou investir dans l'immobilier en ce premier trimestre », abonde Le Partenaire.

Les taux d’emprunt moyens dans les banques pour mars 2020

  • Sur 15 ans : 1,12% d’après Meilleurtaux, 1,15% selon Vousfinancer, 0,91%, pour Le-Partenaire
  • Sur 20 ans : 1,29% d’après Meilleurtaux, 1,35% selon Vousfinancer, 1,07%, pour Le-Partenaire
  • Sur 25 ans : 1,58% d’après Meilleurtaux, 1,55% selon Vousfinancer, 1,34%, pour Le-Partenaire

Taux moyens constatés par les réseaux de courtage, sur la base des barèmes fournis par les banques

Les banques rappelées à l'ordre

Mais ce calme apparent est en trompe-l’œil. L’an dernier, les particuliers se sont rués pour profiter des taux bas au risque que les banques distribuent des prêts immobiliers à des ménages non solvables. Résultat, les autorités, dont le Haut conseil de stabilité financière (HCSF), ont tapé du poing sur la table fin 2019 et exigé de limiter à 33% le taux d’endettement. C’est-à-dire de ne pas accorder un prêt à un ménage avec des échéances de remboursement de crédits qui dépassent 33% des revenus nets avant prélèvement à la source. A cette règle s’ajoute, sauf exception, l’interdiction d’octroyer des prêts sur une durée supérieure à 25 ans. Le message a été reçu 5 sur 5 visiblement.

« Les établissements bancaires appliquent cette règle stricto sensu pour tous les dossiers d'acquéreurs, y compris ceux dont le reste à vivre est suffisant. Ce choix peut donc entraîner un refus de financement pour les ménages les plus modestes mais aussi pour ceux qui achètent dans des métropoles où les prix sont élevés », constate Ludovic Huzieux co-fondateur d’Artemis Courtage. Les particuliers qui veulent faire de l’immobilier locatif sont aussi en première ligne.

Les investisseurs pénalisés

« Les investisseurs sont inévitablement impactés car, pour maximiser l'effet levier du crédit, ils empruntent avec le moins d'apport personnel possible et sur des durées longues, de telle sorte que le futur loyer couvre la plus grande partie de la mensualité du crédit immobilier. En outre, les investisseurs sont déjà souvent propriétaires de leur résidence principale sur laquelle ils ont un crédit en cours. Leur endettement dépasse donc dans la plupart des cas 33% si on prend en compte leur investissement futur sans prise en compte des loyers futurs », analyse Jérome Robin. Selon le directeur général de Vousfinancer, 27% des dossiers refusés en janvier-février sont des dossiers d’investisseurs avec parfois d’excellents profils a priori. Ainsi, une banque a refusé de financer un couple avec 27 000 euros de revenus mensuels et 19 000 euros de reste-à-vivre, pour l'acquisition d'une maison au Pyla car leur taux d’endettement atteignait 39%. Maël Bernier, directrice de la communication de Meilleurtaux, conseille elle de prévoir un délai rallongé pour l'obtention du prêt.

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Des profils chouchoutés

A l’inverse, certains particuliers sont toujours très convoités et peuvent obtenir de beaux rabais. « Les emprunteurs avec 20% d’apport – 10% pour financer les frais + 10% de la valeur du bien – qui achètent leur résidence principale et qui peuvent rembourser leur crédit sur 20 ans sans dépasser 33% d’endettement obtiennent toujours des taux très avantageux ! Une banque propose même désormais une décote de taux de 0,10% lorsque le critère des 33% est respecté », constate Sandrine Allonier, porte-parole de Vousfinancer. « L’écart entre les taux appliqués aux excellents profils et ceux proposés aux dossiers les moins qualitatifs se creuse », note Alban Lacondemine, président fondateur d’Emprunt-Direct.

Les meilleurs profils peuvent peut-être même espérer une offre plus avantageuse dans les semaines à venir grâce au Coronavirus ! Les taux d’emprunt d’Etat français, qui déterminent en partie le niveau des taux des crédits immobiliers, sont actuellement au plus bas depuis octobre 2019. « Dans le contexte actuel d’instabilité boursière et sanitaire, les investisseurs privilégient les placements considérés comme non risqués… Si la baisse des taux d’emprunt d’Etat se poursuit, celle-ci pourrait aider à la reconstitution des marges des banques qui pourraient alors répercuter cette diminution, au moins pour les meilleurs profils », avance Vousfinancer.

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